Les festivités avaient si bien commencé. Tout Ornebois était en fête. Élèves, professeurs, parents et autres sorciers et sorcières, tous avaient répondu à l’appel des portes ouvertes. On avait sonné le début des duels magiques. Ici et là, des sortilèges fusaient, des potions fumaient dans leurs chaudrons et partout on entendait des éclats de rires. Personne n’aurait pu imaginer qu’un tel moment serait gâché… Et pourtant, en une seconde cette journée bascula dans l’horreur. Un sort de mort fendit l’air et un élève tomba à terre, mort. Les activités restèrent en suspens. Le temps s’était soudainement arrêté. En moins d’une seconde, la panique s’empara d’Ornebois. Partout on hurlait et tentait de quitter cet endroit. Des sorts sifflaient, fendaient l’air. La plupart des élèves fuyaient, certain sans qu’on le leur ordonne. D’autres avaient sorti leurs baguettes et imitaient leurs aînés. Il était difficile d’identifier les troubles faits et encore aujourd’hui personne n’avait aucune idée de qui ils étaient vraiment. Le Cercle de Prytwen, voilà le nom qu’ils s’étaient eux-mêmes donné. Personne ne savait qui en faisait parti et cela la rendait d’autant plus dangereuse. L’attaque à Ornebois avait fait quelques morts et un grand nombre de blessés. Honorense de Trevec avait passé tout son temps depuis les évènements enfermée dans son bureau. Elle avait reçu les parents des victimes, la garde de Trecesson et tous les grands sorciers de France. Elle avait reçu et envoyé des hiboux en nombre conséquent et se sentait épuisée. Pourtant, elle devait encore prouver à ses élèves qu’elle était forte. Elle avait revêtu son habit de cérémonie, le plus sombre et s’était présentée devant la salle de banquet où tous les élèves avaient été réunis pour le dîner mais surtout pour écouter leur directrice. « Ce sont des heures bien sombres que nous avons vécues et je crains qu’elles ne perdurent encore. Aussi, ne cédez pas aux ténèbres mes enfants. Gardez en vous la lumière et l’espoir qui en découle. Chacun d’entre nous sera mis à l’épreuve. » Le silence qui régnait dans la salle était inhabituel et pesant. Honorense de Trevec balaya la salle du regard avant de continuer sur un tond 'autant plus grave. « Comme certains de vos camarades déjà partis, je ne doute pas que vos parents feront en sorte de vous éloigner de notre école. Je ne pourrais les en dissuader mais à vous je dirais ceci : Ornebois est l’endroit le plus sûr et le plus à même à vous protégez. La garde de Trecesson m’a déjà assuré que des chevaliers seront spécialement affectés à l’école, et n’oubliez pas vos professeurs qui sont tous de grands sorciers. » Sans plus de mots, elle se retira du devant de la scène pour retourner s’enfermer dans son bureau. Les élèves reprirent leurs conversations dénuées de sourires et de rires. Tout Ornebois était en deuil.

Aux premières lueurs du jour, des éclats de voix se répercutèrent dans les rues de Verteroche. La plupart de ses habitants, encore endormis, se réveillèrent en sursaut, craignant le pire. Peu à peu, sorciers et sorcières sortaient de leurs maisons pour découvrir l’origine de ce tapage. Il ne fallut pas plus de quelques secondes à la population de Verteroche pour comprendre ce qu’il se passait. Le Cercle de Prytwen descendait vers la place du village. Au pas de sa porte, Aimée Desanges resserra les pans de son châle. Un homme encapuchonné hurla « Elle est là ! ». S’en suivit une nouvelle salve de cris parmi lesquels on distinguait « Traître ! » ; « Tu vas brûler !! » ou encore « Mort à la chrétienne ! ». Aimée n’eut pas le temps de se défendre. Emprisonnée par un puissant sort elle fût frappée par des sortilèges de feu qui lui brûlèrent lentement la peau. On la roua de coups avant de la trainer sur la place du village. Le tapage avait réveillé tout Verteroche qui suivait sans rien dire ni rien faire ce cortège de la mort. Une immense croix avait été montée au centre de la place. Quand et par qui ? La question demeure encore sans réponses. Aimée Desanges y fût installée sans ménagement. Un sorcier vêtu de noir et dont le visage restait dissimulé s’avança et s’adressa à toute l’assemblée. « Mes frères et sœurs de Prytwen. Vous, sorciers et sorcières ! Voyez la traitrise incarnée. Cette prétendue sorcière s’est adonnée aux pratiques de nos ennemis ! Elle a adorait un faux dieu et embrassé la voie des impies. » Des cris d’approbation retentirent parmi les adeptes du Cercle. Quelques habitants de Verteroche approuvèrent tandis que d’autres s’éclipsaient  discrètement afin de ne pas assister à la mort imminente de la pauvre Aimée Desanges. « Pour ces crimes cette femme doit payer ! Son châtiment sera celui de son cher dieu ! » L’homme se mit à rire, imiter par ses adeptes. Des clous montèrent dans le ciel, éclairés par les lueurs du soleil. Sans ménagement il pointa sa baguette sur Aimée et les clous vinrent violemment se planter aux creux de ses paumes et dans ses chevilles. Elle hurla tandis que les autres riaient. « Souvenez-vous de ce jour. Et n’oubliez pas ceci : les traîtres ne sont pas à l’abri. Vous subirez tous ce châtiment. » Il transplana, laissant les habitants de verteroche admirait le terrible spectacle. Une vingtaine d’adeptes du Cercle de Prytwen resta sur les lieux, surveillant d’un œil amusé la sacrifiée. Les habitants qui voulurent échapper à l’évènement furent forcé à rester et à regarder, impuissants. Certains tentèrent d’aider la malheureuse, ils furent châtiés immédiatement. Aimée Desanges soufra durant plusieurs heures avant de finalement succomber à sa torture. Elle fût la seule à mourir ce jour là. Son corps inerte resta en vue sur la place jusqu’à la nuit lorsque le dernier adepte du Cercle de Prytwen fût parti. La nouvelle de la mort d’Aimée Desanges se propagea alors. Un hibou fût envoyé à la directrice d’Ornebois et au capitaine de la garde de Trécesson. On organisa des obsèques rapides et sans cérémonie. Personne n'osa prononcer le moindre mot par peur des représailles. Elle ne fût pas enterrée dans le cimetière du village mais à l’écart. Depuis, plus personne n’osa parler d’elle…

Aimée Desanges était une jeune sorcière guérisseuse installée à Verteroche depuis 8 ans. Fille d’un pasteur ayant pêché, elle demeurait très croyante, vouant un amour inconditionnel à Dieu. Elle priait chaque jour. Appréciée par la majorité de la communauté magique, Aimée s’était néanmoins fait des ennemies chez les sorciers et sorcières.